À propos du logo terragraphe
Dimanche 05 octobre 20
15h15 : samedi matin, séquence dans le bourg de Lavernat. J’ai salué le créateur du logo de l’association terragraphe : brève rencontre qui m’ a donné l’idée de revenir sur la création de ce visuel.
J’ai découvert le travail artistique de S. à l’automne 2019, lorsque j’ai vu apparaitre, sur le site internet de Lavernat, un nouveau logo municipal.
C’est à la fin de cet automne 2019 que avons commencé à construire notre liste pour les élections municipales. J’ai contacté S. en décembre, dans ce sens. Il nous a solennellement reçu chez lui, avec J-P pour nous dire son attachement au maire sortant (qui se présentait sur une liste opposée).
Deux jours après cette entrevue, j’ai envoyé un mail à S. pour lui demander s’il serait partant pour réaliser le logo de terragraphe. Ce fut le début d’une petite conversation épistolaire :
Samedi 16 décembre 2019
Bonsoir S.,
Désolé de n’avoir pas signé mon SMS d’hier ; heureux que tu aies réussi à faire le lien avec notre rencontre !
Ma demande est simple : j’ai pensé, après cette rencontre, que ton entreprise pourrait créer un logo pour l’association terragraphe. Cette association souhaite recueillir et éditer des écrits de terrain (biographie, monographie, journal de bord…). L’asso n’invente rien de bien nouveau : elle s’inscrit dans la riche tradition d’une écriture réflexive qui soutient -depuis au moins la renaissance- l’éducation du diariste et de son environnement. Face aux métamorphoses de cet environnement, il ne nous semble pas inutile d’encourager cette pratique localement. Le projet n’est pas simple, les résistances sont nombreuses ! Les gens ont l’esprit saturé par une écriture globale qui occupe de plus en plus leurs terrains d’existence et, de leur côté, les terrains contrôlent de plus en plus ce que les gens écrivent sur eux. Ce dernier point nous fait retarder l’ouverture d’un site en ligne (des incidents relatifs à des premiers envois d’écrits de terrain à des organisations locales nous suggèrent d’être prudents juridiquement). Notre première intention est de faire circuler des écrits de proche en proche. Cela peut être, même, un projet à long terme : nous nous demandons si l’édition domestique n’est pas, après tout, la seule forme d’édition capable d’entrer en résonance avec l’éducation domestique.
Un premier logo a été bricolé. Il est trop chargé et prétentieux. Nous aimerions l’épurer ou en faire un autre (seule demande : pas d’arbre, pas d’arborescence, à la limite des rhizomes)
Trois questions me viennent :
- est-ce que la création de logo entre dans les fonctions de ton entreprise ?
- est-ce que ce projet t’intéresse ?
- Est-ce que notre association a les moyens de financer un tel projet ?
Voilà en quelques mots,
Bertrand Crépeau
Mercredi 18 décembre 2020
S. me répond qu’il était tout à fait possible, pour lui, de créer se logo, qu’il le ferait avec plaisir, qu’il propose des tarifs abordables. Il m’a expliqué que son entreprise était justement centré sur la réalisation de logo, de site internet, de support de communication (affiche etc.).
Il me dit qu’il a cherché le site web terragraphe en vain.
Mercredi 18 décembre 2020
Bonjour S.,
Merci pour cette offre de prix ! Notre association est OK (souhaites-tu que l’on signe ce devis ?)
Jusqu’à aujourd’hui, nous avons retardé (pour des raisons juridiques) l’ouverture d’un site. Le fait qu’une entreprise locale offre ce service pourrait nous faire changer d’avis.
Voici les attentes qui me viennent à l’esprit ce matin :
- un site sobre énergiquement,
- un accès à des textes selon deux entrées (encyclopédique et chronologique)
- la possibilité d’ouvrir des forums de discussion (d’accès « privé » ou « public »)
- à plus long terme, la possibilité de vente en ligne.
est-ce que ces indications te permettent d’établir un devis ?
Bertrand
Vendredi 27 décembre 2020
S. m’écrit qu’il pourra réaliser ce logo dès le mois de janvier 2020. Il me propose un entretien téléphonique pour déterminer les points clefs.
Lundi 13 janvier 2020
Bonjour S.,
Quelques mots par écrit avant notre discussion téléphonique à 11h tout à l’heure
D’un côté une carte, un territoire, du terrestre…. De l’autre un geste d’écriture
Entre les deux une zone critique, conflictuelle, en tout cas, du hiatus, du flou…
- du côté du geste : refus d’écrire sur le terrain (tentation de l’écriture hors sol),
- du côté du terrain : refus de se laisser écrire (tentation d’un sol sans pensée).
Mercredi 15 janvier 2020
S. me fait parvenir en pièce jointe la version 1 logo. Il me dit avoir eu un si grand regard positif sur ce logo qu’il n’a pas souhaité faire de version supplémentaire. Il m’invite à faire part de mes remarques et insiste pour que le logo me corresponde à 100%.
Mercredi 15 janvier 2020
Merci S.,
J’ai vu ton logo ce matin au garage eurovision. Je l’ai trouvé très beau et intelligent. Je me suis senti honoré de constater qu’un créateur avait pris du temps pour promouvoir une association qui me tient à cœur. J’ai trouvé fantastique la façon dont tu as traduit notre petite conversation dans un logo ! Compte tenu de ce que je t’ai dit, ce logo est parfait. De retour chez moi, j’ai senti que quelque chose ne me convenait pas. Je me suis dit qu’il fallait que je fasse l’effort de critiquer ce logo même si ton regard, sur lui, était positif.
À propos de la chaine d’humains, je vois « trop » dans ce logo le clivage « terre «-» terrien » ou encore « Non Humain «-» Humain ». Or, le projet de terragraphe est plutôt d’expérimenter une écriture qui colle à nos terrains de vies faits d’Humain /Non Humain. Pas de chaine NH-NH-H-H-H-H, mais plutôt, par exemple, des chaines NH-H-H-NH-NH-H . Dans cette idée, l’angle géométrique (NH) dessiné en bas à gauche est parfait. Je pense qu’il faudrait accentuer le mixage NH-H visuellement. Par exemple, une humaine pourrait tenir un burin, mais ce n’est pas simple à simplifier… d’où l’idée d’un marteau qui burine le mot terragraphe.
Le crayon (NH) en fin de logo est une idée géniale. La main (H) correspond à ma demande faite au téléphone, mais je trouve que cela n’apporte pas un plus…surtout s’il on comprend que le mot terragraphe est écrit à coups de marteau (et même de burin) par une humaine…Dans le collage ci-dessous, j’ai supprimé la main et le crayon. (On pourrait garder l’exclamation du crayon) Cela va, peut-être, te heurter, car cela supprime une (la) dynamique que tu as donnée au logo, donc je suis bien embêté.
La calligraphie du mot terragraphe s’inspire de ce que je t’ai proposé. Il ne faut pas la changer, la forme accidentée des lettres me plait. Cela « montre » les imperfections d’une écriture de terrain, mais je trouve l’ensemble presque trop beau : trop beau pour être vrai. Au final, une écriture de terrain a une allure plutôt biscornue, bricolée (on y voit des bris-collés) …. Bref, si les lettres conviennent individuellement, l’ensemble est trop harmonieux. Peut-être que le marteau (ou le burin, ou des éclats de terre…) pourrait tenter de briser cette élégance ?
Je te remercie encore pour ce magnifique logo. J’espère que mes nouvelles demandes ne briseront pas ton élan.
Bonne soirée !
Bertrand
Quelques jours plus tard, S. m’a envoyé un tout nouveau logo. Je lui ai demandé de modifier les proportions. Le voici dans sa version finalisée. (S. ma produit une version fond blanc et une version PNG (fond transparent)) .
Lundi 06 octobre 20
7 h: à propos du marteau dans le logo. Je ne l’avais pas pris en compte : cet outil peu « fino » fut présent dans les graphiques de l’armée rouge puis dans ceux liés au communisme dans sa version stalinienne. Le parti travailleur coréen, notamment, l’utilise encore. Ce ne sont pas des entités spécialement terragraphiques. Elles sont, même, à l’opposé « clairement », si je puis dire, cryptographiques (et en écho, terracryptique).
Un autre emploi du marteau me parle plus. J’ai découvert cet été, que la géologie s’était instituée autour de la devise « cum mente et malleo » (avec l’esprit et le marteau). On aperçoit, ainsi, des marteaux dans des logos de sociétés savantes de géologie.
Lors de son premier envoi, S. a proposé deux ébauches. La première est visible ci-dessus. Je n’ai malheureusement pas conservé la seconde. Alors qu’on voit dans la version « 1 », des silhouettes dansant sur le mot « terragraphe », dans la version « 2 », elles s’y balancent. Mouvement oscillant et descendant. Une joie d’enfant. S., peut-être, a voulu illustrer le livre de la philosophe Simone Weil, La Pesanteur et la grâce, dans lequel, comme le note Emmanuel Gabellieri, la descente de la grâce est vue comme « un mouvement contraire à la pesanteur en ce qu’il est amour et non pas chute ». Il y a ici une jolie inspiration à approfondir. Pour la troisième version, S. a accepté de malmener cette grâce. Il a bien su restituer le penchant quasi-nietzschéen de l’association.
Il est question de la création du site internet dans cette petite correspondance. Je n’ai pas donné suite à la proposition de S. pour des raisons que je n’ai pas encore bien élucidées.
Lorsque le site terragraphe a été lancé, nous n’avons pas placé ce logo en haut de la page d’accueil, mais simplement en « icône » (on l’aperçoit, ainsi, dans l’onglet du navigateur). Il a été utilisé, aussi, pour illustrer l’article pourquoi terragraphe ? Après réflexion (S. n’y est pour rien), j’ai trouvé ce logo trop chargé. Il y a quelques jours, j’ai ainsi effacé le globe et le trait de l’angle :
Le visuel est plus sobre. Pas sûr que ses modifications soient pertinentes. Je vais le déposer en entête du site Internet. À voir…