Journal d’une animatrice en EHPAD 1) S’il me voyait travailler, il serait fou !
Mardi 27 mars 2020
19 h 40 : j’ai eu un coup de baisse de moral il y a 15 jours en me demandant comment j’allais pouvoir affronter cette épreuve autant professionnellement que personnellement. Mais après une journée de repos, j’ai rechargé les batteries et j’ai gagné en sérénité. Je pense régulièrement à mon ancien responsable de formation, s’il avait une vue de mon travail il serait fou !!!! Je fais beaucoup d’occupationnel et que de l’individuel pour palier l’ennui… l’éducation populaire est un peu éloignée en ce moment !!!…. Je passe mes journées à passer de chambre en chambre avec mon ordinateur pour proposer des communications Skype. Temps précieux avec une charge émotionnelle intense.
Il faut plus que jamais être dans l’invention pour continuer à créer du lien dans ce moment où les visites sont interdites.
À l’heure d’aujourd’hui nos résidents ne sont pas encore confinés en chambre et peuvent encore se réunir en salle à manger, mais chacun à sa table ! Nous devons prendre soin d’espacer les résidents à plus de 1 m… pas toujours simple pour les personnes atteintes de démence de respecter cette règle essentielle. Je ne propose plus d’animation de groupe pour limiter les contacts. Cependant, j’ai conscience que les choses vont certainement bouger et j’appréhende le confinement en chambre. Je pense que le confinement du personnel au sein de la structure serait une solution moins agressive pour les résidents (même si personnellement c’est une décision très compliquée à prendre). Comme tous les soignants, j’attends les consignes.
Pour ma part depuis cette crise je refuse de travailler en tenue civile, trop peur de rapporter le virus chez moi…. Mais paradoxalement je n’ai pas voulu retrouver ma blouse blanche de soignante… Donc depuis 8 jours je plonge tous les matins dans mon carton de déguisement de Carnaval ! Un jour une Saharienne, le lendemain un arlequin, je me transforme tous les jours pour faire sourire les résidents ! Et c’est très drôle, car les résidents attendent de découvrir dans quelle tenue je vais arriver le matin !
J’ai demandé aux collègues qui ont des enfants d’apporter des dessins pour égayer les murs. Demande formulée également à l’institutrice de l’école primaire qui a répondu une nouvelle fois présente. Elle va envoyer des dessins par mail dès la semaine prochaine.
Cette crise est une épreuve, mais pour ma part je me réjouis chaque jour que notre établissement soit épargné et qu’aucun cas ne soit déclaré. Je pense que si au plus grand malheur nous devions être confrontés au virus et que nous devions affronter le décès de nos résidents je pense que cette tragédie sera bien plus difficile à vivre que le simple fait d’être confiné. Et j’ai une grosse pensée pour tous les soignants et médecins qui sont confrontés au choix de soins dans les hôpitaux. J’espère que des suivis psychologiques seront mis en place à la suite de tout ça.
Bref !!! Voici ma petite vie en ce moment !!!!
Une animatrice en EPHAD