Lecture laborieuse de la presse locale

Temps de lecture : 4 minutes

(Carnet « MÉDIAS LOCAUX »)

Quelques actants mis en valeur par la presse locale (contrée Loinverlà).

SOURCESACTANTSHYBRIDITÉS
13/10/23 OFS, p.16-le programme PVD -2 CC  -Des D3E -1 magasin de matériaux de construction -Des professionnels locauxDes déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE ou D3 E) des professionnels locaux seront récoltés dans un magasin de matériaux suite à la sollicitation de deux communautés de communes (CC) s’inscrivant dans le dispositif Petites villes de demain (PVD).
10/11/23 PCEVL-Du thé -Une fratrie de boulangersDu thé va être proposé en salon par deux frères boulangers. Quel type de thé ? D’où viendrait-il ? L’article ne le précise pas. 
10/11/23 PCEVL, p.22-Une Loi du 10/03/23 -Trois conseils municipauxAppel municipal à avis et suggestions à propos des zones susceptibles d’accueillir la production d’énergies renouvelables.
10/11/23 PCEVL, p.27-Des tomates -Des concombres -Une entreprise -38 CDD -1 MRSUne entreprise productrice de tomates et de concombres va utiliser une MRS (Méthode de recrutement par simulation) pour pourvoir 38 CDD de 8 mois.
10/11/23 PCEVL, p.13-Une variété de Châtaignes -Une confrérie -Une cérémonie d’intronisation -2 personnalités politiques localesLa Nouzillard (variété ancienne de châtaignier) a vu sa confrérie introniser, en son nom, le président du conseil départemental et le député de la circonscription.
  ABRÉVIATIONS   
CC Communauté de communes
CDDContrat à durée déterminée
DEEE (ou D3E)Déchets d’équipements électriques et électroniques
MRSMéthode de recrutement par simulation
OFSOuest-France Sarthe
PCEVLPetit Courrier, l’écho de la Vallée du Loir
PVDPetites Villes de Demain

Jeudi 14 décembre 2023

Je viens de parcours l’édition du 8 décembre 23 du Petit Courrier du Val de Loir. J’ai survolé quelques titres, ai tourné les pages et me suis finalement arrêté sur l’horoscope de la dernière page : «Balance : pour tout ce qui touche à l’édition, la semaine sera prometteuse ». Je n’ai pas réussi à lire autre chose. Comment m’intéresser à cette presse locale en tant que terragraphe ? Je n’en sais rien. Je constate simplement que ce n’est pas ma première tentative. Il y a quelques semaines, j’ai listé une poignée de sigles, actants et hybridités. Le rendu me semble insipide à lire. Après ma lecture de la seconde édition de Paris Invisible (Latour, Hemant, 2021), j’ai pensé que je pourrais cibler ce journal de lecture sur la description des « dioramas » mis en scène dans cette presse. Cette idée reste d’actualité.

Dimanche dernier, ma nièce Adèle m’a fait découvrir Topotte, un trimestriel qui aborde les problèmes globaux à partir  d’un point de vie angevin. C’est intéressant. Ce type de journal manque dans notre contrée. D’emblée, je ne me suis pas senti fan de la ligne éditorialiste de ce journal local. Cette ligne se revendique comme « exigeante » et surtout « critique ». De mon point de vue, cette ligne « critique » ne peut que prendre ses lecteurs que de haut. Elle me fait songer à cette appropriation capitalistique de la critique anti-capitaliste : cette impression désagréable qu’au nom de la lutte, on écrase « les » mondes. Une chose qui me fou en rage. Un caillou au fond de ma chaussure.

Plus tard,

La lecture des articles de topotte m’a fait réviser mon appréhension. Ils empruntent une voie plus descriptive qu’explicative. Je me suis mis en rage pour rien : l’énoncé de la ligne éditorial décrit heureusement très mal le contenu édité.

Que peut-on dire de la ligne éditoriale du Petit courrier du val de Loir ?  Elle n’est pas énoncée dans l’édition que je viens de feuilleter. Je me souviens avoir publié sur le site terragraphe, quelques notes à propos d’un article du Petit courrier sur un directeur régional ou national du groupe Publihebdos qui chapeaute cet hebdo du coin. Je ne retrouve pas ces notes que j’avais exclusivement déposées sur le site terragraphe. Comme d’autres prises de notes, je les ai malencontreusement « écrasés » lorsque j’ai retiré une extension de mise en forme de blocs de texte.

Une rapide recherche sur le web m’apprend que Publihebdos, né en 2017, réunis une centaine d’hebdomadaires locaux. Publihebdos fait partie du groupe Sipa Sipa Ouest-France dont l’actionnaire unique est l’Association pour le Soutien des Principes de la Démocratie Humaniste. Le site de Publihebdos : actu.fr m’a dirigé vers un Pdf qui présente le projet éditorial de ce groupe d’hebdos.

Un paragraphe sur la raison d’être et la mission de ces médias annonce ceci:

« Nous sommes convaincus que la vitalité des médias locaux est utile au bon fonctionnement de la démocratie locale. Actu.fr diffuse en toute indépendance des informations vérifiées, non partisanes, en privilégiant les informations de proximité, pratiques et concernantes. Nous accordons une grande place à l’humain et favorisons les débats d’idées ».

Que penser de ce mot « information » ? Dans une récente note de lecture, j’ai relayé cette idée latourienne (et même simondienne) que « l’information » n’existe pas en soi. Je ne relayais pas, alors, un point de vue critique, mais un point de vue philosophique. Je ne voulais pas dire que l’information n’est que « mensonge ». Je voulais dire qu’elle n’existe qu’à travers ce qu’elle prétend ne pas être : une transformation, une traduction, une trahison, une transduction.

Je voulais dire, aussi, que ce point de vue philosophique m’embarrasse tant la magie de l’information me fascine. Il y a beaucoup d’heures où je n’aime pas avoir à penser son caractère bricolé. Lorsque j’ai appris, ce matin, que Dortmund et le PSG ont « fait » 1-1, j’ai aimé penser qu’un match de foot lointain avait fait, pour moi, « 1-1 » et que c’était vraiment très sympa, à lui. Tout à l’heure, je me suis senti de la même façon « honoré », lorsque la constellation de mon ascendant m’a annoncé (directement et par voie de presse) que « pour tout ce qui touche à l’édition, la semaine sera prometteuse ».  

En lisant le contenu de ma presse locale, j’arrive moins facilement à m’illusionner. Je peux, pour une part, difficilement faire fi du caractère bricolé des textes, des photos, de la mise en page. D’autre part, je n’y comprends pas grand-chose ! et cela me renvoie au propre bricolage de mes connaissances locales ! Les noms des lieux, des gens et des instances cités me paraissent appartenir à un monde lointain. Je connais mal « ma » géographie sarthoise et je ne fréquente pas suffisamment les personnalités, les structures administratives, associatives, économiques, etc… qui font, d’après mon hebdo local, exister cette géographie locale.  

Explorer cette presse locale ne me semble pas une mince affaire, mais j’aimerai de temps en temps m’y atteler en tant que terragraphe. À mes yeux, la production d’une presse locale, c’est d’abord la production d’un « espace » (dans un sens probablement Lefevrien). Un maraicher vient de s’installer dans un village voisin du mien. J’ai longuement parlé avec lui. En l’écoutant me présenter son travail de production, j’ai compris à quel point son enjeu n’était pas tout à fait de produire « local » (dans un sens où le « local » existerait avant son travail de production), mais plus précisément « du local » (et cela m’a semblé particulièrement vertigineux tant les réticulations techniques, juridiques, économiques, affectives, etc m’ont paru insaisissables, incertaines, infinies).

Vendredi 15 décembre 2023

Je suis en train de lire Le philosophe, la terre et le virus, de Patrice Maniglier (Les liens qui libèrent, 2021). C’est intéressant. Le livre oscille entre le commentaire anodin (local) et la structuration philosophique (globale) : je me dis que cette bilocalité d’écriture pourrait m’aider à tenir ce journal de lecture sur la presse locale.  À suivre…

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