Resto, boulot, journaux

Mercredi 02 décembre 2020

J’ai commencé à écrire ce récit en 2011. J’avais, alors, en tête la dispense d’un cours auprès d’une cohorte d’étudiants éducateurs spécialisés sur « l’analyse institutionnelle ». Je ne trouvais pas simple de présenter cette discipline qui a cette particularité de ne pas en être une. Si elle en fut une, les vieux travailleurs sociaux ont perdu l’habitude de la pratiquer. Pour leur part, les jeunes travailleurs sociaux sont, vis-à-vis de son appellation, « littéralement » perdus : les établissements, dans lesquels ils découvrent leur métier, ont pris l’habitude de se faire nommer « institution ». « L’analyse institutionnelle » est donc, pour eux, l’analyse des établissements ou plutôt « l’analysme » : un froid morcèlement bureaucratique de l’analyse dont ils constatent au quotidien les ravages.

L’institution de l’analyse dans les établissements du travail social s’étant coupée, et de son histoire singulière, et de sa singulière technique « historisante », j’ai pensé que je pourrais raconter l’institution de mes différentes analyses à propos de mes entrées dans la recherche sur l’analyse institutionnelle. Voilà, en quelques mots, le tour de passe-passe pédagogique que j’avais en tête en commençant ce récit.

Sauf que voilà, en l’écrivant, je me « rends compte » (vingt-huit fois au présent dans ce récit) que je ne raconte pas véritablement mon rapport « naissant » à l’analyse institutionnelle universitaire, ni celui, « vieillissant », à l’institution de l’analyse telle que je l’avais endurée tout au long de ma carrière dans le médico-social. Ce dont je « me rends compte » (et de trente), c’est que ce travail d’écriture m’aide à prendre la mesure de mon rapport à la « technique » (pour employer un mot qui veut à peu près dire ce que je ressens alors). Le récit fut publié en 2012 aux Presses Universitaire de Sainte-Gemme puis quelque peu prolongé jusqu’à l’écriture d’une thèse, en 2013, où j’ai soutenu, par l’exemple, les hautes idées que je me faisais de la fabrique technique, sociale, terre à terre de cette haute idée de la recherche (et de l’analyse) qui souffre de n’être vénérée comme une institution.

En début de semaine, un jeune travailleur social, Alexis Bauvineau, m’a demandé de lui envoyer ce récit (j’avais eu la drôle d’idée de lui en raconter l’existence). Je viens de le remettre en forme pour une lecture qui, j’espère, sera possible via un petit écran qu’il possède certainement. Je n’ai rien voulu changer de ce texte joliment daté (au sens ni propre ni figuré). En le relisant, j’ai simplement veillé à supprimer les accents circonflexes que mon logiciel de correction orthographique m’a amicalement préconisé de retirer.

Je crois que je n’ai rien d’autre à déclarer pour excuser la fabrication de ce qui peut se télécharger ici.

Bertrand Crépeau Bironneau

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