Fermettier (juillet 2021)

01/07/2021

Trois derniers jours de travail intense. Sous le tunnel, ai arraché le liseron ainsi qu’une autre plante encore plus coriace (aux petites fleurs blanches :  je ne connais pas son nom).

J’ai sorti les deux étagères contenant les affaires liées aux clôtures pour les mettre dans l’abri. Cela permet d’avoir à portée de main, dans ce tunnel, uniquement les « choses » utiles pour le jardinage (graines, terreaux, pots, filets de protection et outils de jardinage).

Pas simple d’avoir deux lieux où sont entreposés les outils. Ce matin, lorsque j’ai installé la bâche (pour faire une allée provisoire), j’ai réalisé qu’il me fallait la masse pour enfoncer les agrafes. La bâche et les agrafes étaient rangées dans le tunnel et la masse, cinquante mètres plus loin, dans l’abri. Il serait intéressant que je décrive le moment où je me suis rendu compte de cela alors que j’étais dans le tunnel. Je me suis dit « Ha oui, zut » puis, après un soupir, j’ai commencé à marcher tête basse en direction de l’abri. Tête basse, mais avec un pas décidé et régulier. Dans ma tête et mes pas, ce détour vers l’abri ne faisait que rejoindre tous ces détours de ma journée de fermettier. Dans cette heure de l’après-midi, qui m’était d’ailleurs inconnue, je n’avais pas le sentiment de vivre un véritable contretemps. En allant vers l’abri, j’avais simplement le souci de m’appliquer à marcher à un rythme que j’essaie de retranscrire dans ce journal : un rythme de fermettier, un rythme qui me tenait et que j’appréciais tenir.

En écrivant ces lignes, je me rends compte que les filets (stockés dans le tunnel) ont besoin aussi d’agrafes (maintenant rangées dans l’abri). Il me faudra remédier à cela si je ne veux pas, à nouveau, décrire les détours d’un chercheur de terragraphe à la recherche d’agrafes.

Hier, j’ai tondu devant la maison, autour du parking et au niveau du chemin. Cela fait du bien de faire ce travail de « mise à plat ». J’ai aussi beaucoup rangé « ma » cuisine. Je me sentais dépassé par rapport aux travaux domestiques. Le rangement de cette pièce de ma fermette m’a donné de l’élan, hier, pour tondre ses alentours.

Ce qu’il me reste à faire : repiquer le thym, nettoyer la zone de semis de la serre, débroussailler le long des clôtures, tondre le verger, bruler l’herbe du parking, récolter les aromatiques, aller à la déchetterie, continuer à désherber les planches de menthes et de mélisse.  

Il faut que je veille à ne pas trop agrandir cette liste pour les années à venir. J’avais envie de rajouter des planches d’aromatiques l’hiver prochain. En ce début d’été, je me demande si c’est une bonne idée. Le désherbage est un travail que j’aime faire, mais il demande du temps. Puisque je n’ai pas ce temps, je devrais plutôt écrire, ici, que « le désherbage est un travail qui demande du temps, dans le cas où je pourrais en disposer ». C’est un travail qui prouve, parce qu’il n’est pas fait, que bien d’autres travaux sont réalisés à cette époque. J’ai appris, apprenti horticole, que le sèneçon témoigne de la présence de « rouille » dans le jardin. J’apprends, fermettier, que sa survie, parmi les bonnes herbes, témoigne de la réalisation de bien d’autres travaux qui ne laissent pas, au jardinier, l’occasion de rouiller sur place. 

04/07/2021

J’ai commencé à désherber le parking. La pluie permet d’arracher pas mal d’herbes. L’activité fut plaisante sauf pour une espèce végétale dont je ne connais pas le nom (une plante différente de celle du tunnel, dont le nom m’est aussi inconnu). Ses racines sont impossibles à retirer à la main : ai dû employé une petite binette. J’étais content de commencer ce travail un dimanche. C’est comme si j’avais travaillé en dehors du calendrier.

Hier, je n’ai rien fait à part dix minutes de balayage juste avant une averse.

07/07/2021

Ai coupé les herbes qui touchent le fil électrique de la clôture de piquets jaunes. Quelques-unes de ces herbes ont jauni sous l’effet du courant : ai pensé que cela pouvait provoquer un départ de feu. J’ai aussi passé le coupe-fil sur l’allée de dalles.

Après trois heures de travail, en marchant à l’extérieur du tunnel, côté « Est », je me suis rendu compte qu’il y avait de grandes herbes à retirer. Je n’avais pas anticipé ce travail. Cela m’a « coupé les pattes », je me suis dit « ce n’est pas possible, je n’en aurais donc jamais fini ! ».

07/07/2021

Désherbage de la bâche côté du tunnel côté « Est » et « Nord ». 1 h 30 de travail, je crois. Chronométrer précisément les différents travaux de fermettier que j’énumère dans ce journal m’obligerait à travailler avec une montre. Il me faudrait en racheter une.  

J’attends qu’il fasse sec pour pouvoir passer le bruleur sur le parking. J’ai commencé à désherber les grandes herbes qui poussent dans les pommes de terre plantées à l’extérieur. J’ai posé un piège à l’entrée ouest du tunnel, précisément à l’endroit où j’ai vu une crotte de rat.

Je compte refaire un petit poulailler à l’entrée « Est » du tunnel.  

08/07/2021

Débroussaillage du tiers de la clôture du pré aux ânes (du parking jusqu’aux trois quarts de la route). Ai utilisé le fil (épais) et non la lame pour ne pas abimer les piquets de clôture. Douleur au dos. Ai eu la sagesse de ne pas continuer après que la machine est usée tout son réservoir de carburant. Je me suis moqué de passer pour quelqu’un qui interrompt son travail -c’est le cas de le dire- « en cours de route ».

Quelle fut la durée de cette séquence de débroussaillage ? 1 h 30 ? Plus ? Je ne sais pas. Je sais que mon teeshirt était complètement mouillé par la sueur. Habitant d’un appartement, je n’aurais pas tous les jours l’occasion de transpirer. J’étais fatigué lorsque j’ai commencé le débroussaillage, mais en cours de route, j’ai ressenti l’énergie qui revenait.  

Lorsque la machine marche bien et que l’herbe se laisse couper facilement, débroussailler est une tâche gratifiante, car le résultat se « voit » immédiatement. Elle n’est pas très compliquée d’un point de vue technique, il faut juste être constant dans l’effort et ne pas lâcher l’attention.

À propos de technique, ai trouvé aujourd’hui cette astuce d’accrocher une tenaille à mon harnais. Cela m’a permis d’éviter de faire un détour vers l’abri pour remettre en place le fil de la bobine.

La pluie des derniers jours n’a pas permis à notre voisin agriculteur de venir faire les foins dans ce pré. Pour préparer sa venue, je compte débroussailler (avec la lame) autour de la fosse septique, des deux pierres du pré et des trois trous de la tranchée (trois regards provisoires dans l’attente de la pose du fil électrique souterrain).

09/07/2021

9 h 30 : après le brossage des ânes, 1 h 30 de désherbage ce matin. Un peu papillonné : j’ai commencé par désherber le petit rectangle de thym, puis ai retiré les orties dans la menthe, puis ai désherbé douze mètres carrés de parking.

Ce fut très agréable : voir mes planches d’aromatiques sous le soleil avec très peu d’herbes non voulues, la lavande en fleur, la mélisse en pleine feuille, la menthe poussant là où je lui ai demandé et les romarins qui ont doublé de volume en une année. Satisfaction, perception d’un accomplissement. Ai apprécié le calme et le silence de cette activité de désherbage. Je me suis senti dans un état d’esprit tout à fait différent de celui d’hier (où j’ai débroussaillé dans une ambiance sonore et vibrante tout autre).

Ce calme m’a fait me projeter dans mon activité de fermier en herbe. Je me suis vue mettre en sachet les plantes que j’avais sous les yeux, puis les proposer à la vente les jours de marché.

18 h 43, cet après-midi, ai brulé les herbes du parking en deux séquences : une première à 14 h, puis une deuxième vers 18 h. Technique assez efficace : pour le premier passage, veiller à ce que le soleil ait fait disparaitre la rosée. Pour le second, veiller à ce que les plantes ai commencé à sécher : elles brulent, alors, presque entièrement.

Entre ces deux séquences de brulage, ai débroussaillé le deuxième tiers du tour de la clôture du pré aux ânes. Ai perdu le couvercle du boitier du fil au moment où je commençais à avoir mal au dos. Ai décidé d’arrêter. Cet incident m’a fait donner de l’importance au « futur », à la probable nécessité de me faire aider lorsque je serais plus âgé. Retrouvant mon souffle, je me suis repris et redressé : je ne veux surtout pas donner du pouvoir à ce futur de fermettier : il est incapable de me donner une information sur le présent.

J’ai bien avancé.

Ai resongé au comptage de mon temps de fermettier. Cette année, le débroussaillage du pré aux ânes me prendra l’équivalent d’une journée pleine. C’est plus que d’habitude (à cause du début d’été pluvieux) mais ce n’est pas le bout du monde.

Lorsque je travaillais à temps plein, je réussissais à faire ce travail de fermettier le weekend. Depuis que je ne travaille plus, j’ai l’impression de ne faire que cela. La vérité doit se trouver entre ces deux extrêmes. Je ne suis ni un fermettier du dimanche ni un fermettier à temps plein.

Je ne décris pas précisément mes journées de fermettier dans ce journal. Je travaille sans montre et je ne fais pas l’effort de tout lister. Cela me convient. Avec ce journal, ce qui m’intéresse, c’est de voir comment ce travail d’écriture me redresse anthropologiquement en tant que fermettier. Il y a des soirs où je me dis que je n’ai pas « foutu » grand-chose, mais lorsque je note dans mon carnet le peu que j’ai fait, je me « retrouve » comme fermettier. Il y a d’autres soirs où je n’ai pas besoin de noter à quel point je suis fermettier, tellement cela me parait évident.

10/07/2021

J’ai désherbé à la main les herbes brulées sur le parking, hier (essentiellement la presle le long de la grange). J’ai gratté aussi les dalles de l’escalier qui mène au potager (ainsi que celles de l’allée). Cela m’a pris deux heures, je crois.

j’ai brossé les ânes. Fifi a presque perdu son poil d’hiver. Ce matin, elle s’est retournée vers moi comme pour me remercier. Coco, au poil plus court semble moins apprécier. Le dos de Baba est, à nouveau, couvert de dermites. Le moindre contact l’irrite. Je me contente de le brosser autour de la tête.

A noter pour plus tard : les bêtes ne se laissent pas facilement approcher lorsqu’elles broutent. Lorsque c’est le bon moment (tôt le matin) Fifi préfère que j’utilise la brosse plutôt que mes mains. Les bêtes préfèrent, aussi, être ensemble au moment du brossage. Je commence toujours par Fifi, car elle me semble la plus indépendante. Très souvent, dès que je commence à brosser Fifi, Coco pose sa tête sur le dos de sa sœur. Baba peut faire la même chose sur le do de Coco. Ce moment du brossage apaise les relations entre nous.

15/07/2021

J’ai débroussaillé la fin de la clôture du pré aux ânes ainsi que le tour de la fosse, des pierres et des trous de la tranchée. Ce pré aux ânes est assez mal nommé, car les ânes ne broutent que dans un quart, environ, de ce pré. Le reste est réservé au foin (qui n’est toujours pas « fait »). En prévision de notre départ en vacances, je compte étendre cette petite partie de broutage à la zone recouvrant la fosse septique. J’y vois deux avantages : 1) avec ce surplus d’herbes, les ânes seront moins tentés de franchir la clôture ; 2) Si l’agriculteur vient faire les foins pendant nos vacances, il n’aura pas besoin de contourner cette zone.

Demain, je compte repiquer le thym.

16/07/2021

Hier, j’ai été en vélo rendre visite à notre voisin agriculteur. Il était absent. J’ai expliqué à son jeune fils que j’avais préparé le pré au cas où son père viendrait faire le foin lors de notre semaine de vacances. Il m’a dit qu’il en doutait.

Ai, enfin, repiqué le thym.

24/07/2021

Hier à 19 heures : retour de vacances. Les foins n’ont effectivement pas été « fait ». Après avoir sorti les bagages, salué les ânes et nourri le chat, j’ai tondu devant la maison et au niveau du parking en prévision de la pluie annoncée ces prochains jours. Cette tonte va me permettre de refaire une tonte plus rase juste avant la venue des enfants dans dix jours.

Je n’ai pas eu besoin d’arroser le jardin. En fait, aujourd’hui je n’ai rien fait de spécial. J’ai juste nourri les bêtes avec quelques friandises (des feuilles de châtaignier notamment). Ai touché baba et un tout petit peu Fifi. Coco est restée distante. Après cette semaine de vacances, je me dis (peut-être à tort) qu’il me faudra plusieurs jours pour reprendre contact avec eux.

La cogitation de mes vacances sur la pensée religieuse (au sens de Simondon) m’a fait penser que je pourrais entretenir une relation plus « identitaire » avec mes bêtes. Une relation non seulement centrée sur la pensée technique, mais aussi sur la prise en compte globale de nos entités. Un point d’attention à suivre.

À propos d’entité, je reste toujours ignorant du nom des deux plantes que je n’arrive pas facilement à arracher dans le tunnel et sur le parking. Et à propos d’entité, encore : six poules ont disparu. Cela signe la présence passagère, sur notre fermette, d’un ou de plusieurs renards. À propos d’entité, enfin, je dois noter, ici, cette vision matinale d’un chevreuil broutant la pelouse devant la maison. Les prairies entourant la maison étant encore enherbées, l’animal, a peut-être cru que son « chez lui » s’étendait tout près de notre « chez nous ».

25/07/2021

Ai remplacé le vieil interrupteur d’un des deux éclairages intérieurs de la grange. Ai bricolé un couvercle sur un boitier électrique (protégé jusqu’à aujourd’hui par un tout petit sot plastique). J’hésite à réparer l’autre type d’éclairage : un vieux boitier de néon sans lampe ni couvercle. Je me dis que je pourrais, plutôt, acheter un petit projecteur « led ».

J’ai retiré quelques sèneçons poussant dans la menthe.  Ai réparé la partie de la clôture que j’avais dû arracher pour réaliser la tranchée.

29/07/2021

Brulage du parking (quelques herbes avaient commencé à germer). Ai commencé à préparer la grange pour la venue des enfants : ai sorti la remorque et trois sacs de tas de bois. Ai pelleté du gravier sur le dessus du parking abimé par le creusement de la tranchée. Ai fait cuire ma première récolte de pommes de terre. Deux poules de plus ont disparu. Demain, je tue le coq. 

30/07/2021

Journée non-stop de fermettage. Ce matin, tonte du chemin, du talus, puis des abords des aromatiques. Cet après-midi, tonte du verger. Deux déboires mécaniques durant cette journée : ce matin, la courroie a lâché et cet après-midi, c’est le boulon de la poulie d’entrainement de cette courroie qui s’est dévissé. Je ne l’ai pas retrouvé dans l’herbe (ni son équivalent dans ma boite à boulon). Je suis confiant. Je vais trouver une solution. J’ai rentré la tondeuse débroussailleuse dans l’abri. Il faut que la machine refroidisse. Il faut, aussi, que je me repose.

J’ai passé un nouveau « coup » de bruleur sur le parking. Celui-ci a rarement été aussi propre.

Entre autres, ai commencé à faire les lits dans mon ancien bureau. Ai pesté contre une couette et son soi-disant drap-housse.

Beaucoup de choses restent à faire avant la venue des petits. Je les ai notés sur un petit carnet rouge.

Rien de stressant. Le plus gros est fait : les trois jours qui viennent, avant l’arrivée des enfants, vont être plus cools. D’ailleurs, concernant cette journée non-stop de fermettage, le renard a sérieusement allégé mon planning en se chargeant lui-même de tuer le coq juste avant la levée du soleil.

This morning I had planned to kill the rooster. I heard him sing around six o’clock. Or probably before. He didn’t sing long. Then, when I went out I didn’t see him. I thought a fox had killed him. Tonight, I have no doubt.   

31/07/21

Hier, j’ai ajouté un petit espace de broutage le long du ruisseau du pré aux ânes. C’est à partir de cet endroit que vient (ou viennent) le (ou les) renard(s). Malgré mon insistance, les ânes n’ont pas voulu y aller  : le sol mouillé était trop meuble pour eux. Cet après-midi, j’ai dû débroussailler une nouvelle bande d’herbe pour élargir le rectangle qui longe le ruisseau. Actuellement, nos trois ânes broutent dans cette zone. J’espère que  leur présence dissuadera les renards. (J’ai déjà vu nos ânes courser des chiens de chasse). Les années précédentes, les ânes broutaient dans cette partie du pré. Pour les mettre au régime en ce début de printemps, je leur en ai interdit l’accès. Chacun son tour. Cela va maintenant être au(x) renard(s) de s’y mettre.

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